• Pioche! Magazine
  • Posts
  • 🌿 Nous avons un gagnant | Je n’écris pas pour faire joli | Roulez jeunesse | Son père pleure | Petits liens | Commuto...

🌿 Nous avons un gagnant | Je n’écris pas pour faire joli | Roulez jeunesse | Son père pleure | Petits liens | Commuto...

Culture & écologies 🌿

Bonjour Ă  toutes et tous, et bienvenue si vous nous rejoignez sur Pioche!

« Hier, j’ai vu pleurer mon pĂšre dans la cuisine, un papier Ă  la main. » C’est par ces mots que Samuel ChabrĂ©, dont les (excellents) articles jalonnent les colonnes de Pioche!, a commencĂ© son post LinkedIn.

Des mots qui suscitent la colĂšre face Ă  l’annonce de la maigre pension d’invaliditĂ© que son « daron », comme il dit, a obtenu des assurances aprĂšs 40 ans d’un travail agricole – « celles et ceux qui triment en silence pour nous nourrir » – qui lui aura coĂ»tĂ© ses mains, son genou et une Ă©paule.

Des mots qui rĂ©sonnent forts, aussi, parce qu’ils font Ă©cho Ă  notre rapport au travail, Ă  l’injonction de la productivitĂ© – lire Ă  ce sujet le dernier Nicolas Framont, « Vous ne dĂ©testez pas le lundi... » (Les Liens qui LibĂšrent, oct. 2024).

Des mots qui touchent enfin parce qu’on a l’impression de le connaĂźtre, son daron. D’autant plus aprĂšs avoir Ă©coutĂ© les premiers Ă©pisodes du (trĂšs bon) podcast « Le monde Paysan, mon pĂšre et moi », oĂč Samuel et son pĂšre partent sur les routes agricoles de France.

Ou est-ce surtout parce qu’ils parlent aussi de nos corps et/ou de ceux de tant de nos proches ?

Bonne lecture, bonne semaine,
Et bonne pioche.

1. Nous avons un gagnant

Le cliché lauréat du prix du public au « Standard Chartered Climate Award 2024 » ©Gerson Turelly.

La win. Le Prix COAL 2024 rĂ©compensait cette annĂ©e une Ɠuvre d’art engagĂ©e pour l’écologie autour du thĂšme « Se Transformer ». Parmi les laurĂ©ats, la mention spĂ©ciale du jury est allĂ©e Ă  l’Ɠuvre de C.Δ.R (pour Cellule d’action rituelle), ce collectif d’artistes formĂ© en 2019 Ă  la ZAD de Notre-Dame-des-Landes et travaillant notamment sur la crĂ©ation de rituels – espaces de jeu et d’invention essentiels au commun – dans des lieux qui en ont Ă©tĂ© dĂ©munis.

Flow. Autre prix, autre ambiance, celui rĂ©compensant le Photographe mĂ©tĂ©o de l'annĂ©e. Parmi les images toutes plus belles les unes que les autres (Ă  retrouver ici), le Prix du public a Ă©tĂ© dĂ©cernĂ© Ă  Gerson Turelly pour son clichĂ© – impressionnant – de ce rameur en kayak au centre d’un Porto Alegre (BrĂ©sil) inondĂ© par le Rio Grande, au printemps 2024, se dirigeant vers des personnes Ă  secourir.

Chapeau. Enfin le Prix MaMA Invent Riffx 2024 de l’innovation pour la musique – oĂč nous officiions comme jurĂ© aux cĂŽtĂ©s de l’unique (et trĂšs sympa) AndrĂ© Manoukian – a Ă©tĂ© remportĂ© par Fairly pour son outil de calcul d’impact environnemental global dĂ©diĂ© au spectacle vivant ; en gros, une sorte de Nutri-Score des concerts. On en reparle bientĂŽt ici.

2. « Je n’écris pas pour faire joli » – Wendy Delorme

Avec Le chant de la riviĂšre (Cambourakis, 2024), l’auteure queer et fĂ©ministe Wendy Delorme fait rĂ©sonner les mots d’une riviĂšre et d’une femme pour conter avec douceur deux histoires d’amour hors normes, et poursuivre l’exploration de ses thĂšmes de cƓur : le genre, le dĂ©sir, le corps. Ou quand poĂ©sie, amour et lutte s’unissent Ă  nouveau. Baptiste Thomasset l’a rencontrĂ©e Ă  Lyon.

Le chant de la riviĂšre a Ă©tĂ© Ă©crit pendant un sĂ©jour en montagne. C’est la premiĂšre fois qu’un lieu vous fait Ă©crire ?

Wendy Delorme : Non, mais c’est la premiĂšre fois qu’un lieu dĂ©cide du texte. Cette montagne dĂ©crite dans le roman existe vraiment. Pour mes autres livres, je m’inspire librement de certaines gĂ©ographies, comme celle de la ville de Lyon pour Viendra le temps du feu.

Cette fois, je me suis renseignĂ©e sur le hameau. J’ai beaucoup lu sur les modes de vie en montagne au siĂšcle dernier, sur la faune, la flore. Et j’ai Ă©changĂ© avec un habitant du village pour qu’il s’assure que mes descriptions soient crĂ©dibles, qu’elles ne tombent pas dans le folklorisme. L’écriture Ă©tait aussi une maniĂšre d'explorer ce lieu.

Cette histoire d’amour entre Clara et Meni, racontĂ©e par la riviĂšre, est une archive imaginaire. Mais ce dĂ©sir de prĂ©cision les a rendues rĂ©elles. J’ai l’impression qu’elles ont vraiment existĂ©.

AprĂšs votre essai Devenir lionne, qui propose une relecture fĂ©ministe des mythes projetĂ©s sur le monde animal, les animaux et les Ă©lĂ©ments naturels prennent de plus en plus de place dans vos livres. Comment l’expliquez-vous ?

J’ai l’impression que l’humain s’efface progressivement dans mes livres au profit d’entitĂ©s naturelles. Je suis en train d'Ă©crire un roman dans lequel une partie des personnages sont des cours d’eau. (
)

Il y a quelque chose dans le processus crĂ©atif qui vient de l’instinctif, de l’organique, qui n’est pas dĂ©cidĂ© et conscient. Une fois le premier jet Ă©crit, je peux passer des heures Ă  travailler la rythmique ou la structure du texte.

Je n’écris pas pour faire joli. Si je rĂ©ussi Ă  passer autant de temps sur un texte, c’est qu’il est portĂ© par quelque chose de plus grand et qui me tient vraiment Ă  cƓur : l’amour, le vivant


Vous avez rĂ©cemment confiĂ© que votre prochain livre s’ouvrira sur une question : « la littĂ©rature peut-elle lutter contre les mĂ©ga-bassines ? ». Avez-vous trouvĂ© la rĂ©ponse que vous cherchiez ?

Monique Wittig, dans Le chantier littĂ©raire, le manuscrit de sa thĂšse publiĂ© aprĂšs sa mort, explique que le langage agit sur la rĂ©alitĂ©, impacte le rĂ©el en forgeant nos cadres de perception du rĂ©el. Ainsi, ce n’est pas pareil de dire « un homme » ou « une personne », un·e « mineur·e isolé·e » ou « un·e enfant abandonné·e », un·e « Ă©co-terroriste » ou un·e « Ă©co-rĂ©sistant·e ».

Les luttes queer, fĂ©ministes, Ă©colos ou contre l’extrĂȘme-droite se jouent aussi sur le plan culturel. Il ne faut pas laisser certains mots s’installer dans le vocabulaire, ils nous habituent progressivement Ă  des choses dangereuses. Lorsque certains mĂ©dias parlent d’« ultra-droite », ils rendent plus acceptable l’« extrĂȘme droite ». Ce travail, c’est la responsabilitĂ© de tous·tes celles et ceux dont le mĂ©tier tourne autour du langage.

Lire l’intĂ©gralitĂ© de l’interview sur Pioche!.
Se procurer Le Chant de la riviĂšre, aux Ă©ditions Cambourakis.

3. Roulez jeunesse

Scream. Blasé·es des dĂ©cors kitsch d’Halloween ? Relevez le niveau, et essayez-vous au show drag mĂ©tal Louder proposĂ© par la REcyclerie et le MusĂ©e du Vivant d’AgroParis Tech ce soir. Une soirĂ©e – gratuite, c’est sympa – pour ouvrir leur nouveau cycle dĂ©diĂ© Ă  l’écologie et Ă  la peur. Costumes, vidĂ©os, sculptures, podcasts, rĂ©flexions, archives
 Si l’humanitĂ© raconte partout sa peur de la nature, n’est-elle pas plutĂŽt son expression la plus effrayante ? De quoi passer un autre Halloween.

It’s a match. Soyons clairs : on adore le festival Isulia (7-10/11, Bordeaux). Et d’abord parce que l’équipe aux commandes fait les choses bien : DA exigeante, une affiche de talents electro, rap, rock, drag locaux et internationaux, et un soin particulier apportĂ© aux talks, avec des sujets qui comptent (enfin) pour la jeune gĂ©nĂ©ration. On citera ici « Un travail qui fait sens, qu'est-ce que ça veut dire ? », « Que signifie “ĂȘtre jeune” en 2024 ? » ou « Le secteur culturel a-t-il encore un temps d’avance ? ». PrĂ©cis, et juste.

Maestria. Qu’une Ă©cole d’ingĂ©s organise un festival pour aborder la question de l’intime, c’est dĂ©jĂ  une excellente nouvelle. Lorsqu’en plus cela passe par une remarquable programmation de thĂ©Ăątre, de danse, de cinĂ©ma, de dĂ©bats et de fĂȘte, l’initiative de l’INSA Lyon, en l’occurrence, est Ă  applaudir et Ă  encourager vivement. On s’y retrouve avec Pioche! en clĂŽture le 18/12, mais d’ici lĂ , plongez dans le passionnant programme qui dĂ©marre ce 5/11.

CƓur avec les doigts pour le 40e FIFO, pour Festival international du film ornithologique de MĂ©nigoute (29/10-3/11), qui se dĂ©roule depuis 1985 dans ce bourg Ă©ponyme de 900 Ăąmes, situĂ© dans les Deux-SĂšvres. Et qui, cette fois encore, rĂ©unit la crĂšme des artistes (cinĂ©astes, photographes, illustrateurs
), experts et passionné·es du vivant. La collection « Mondes sauvages » d’Actes Sud y a son maroquin.

4. L’avenir à du bon

Le livre. Murray Bookchin (1921-2006) n’en finit plus d’avoir le cote. Ancien ouvrier de General Motors, cet penseur autodidacte de l’écologie politique ne cesse d’ĂȘtre invoquĂ© pour son approche permettant de « penser ensemble Ă©cologie et organisation sociale, Ă©conomie et morale, pratiques militantes et sociĂ©tĂ© future » (lire cet article de La Vie des idĂ©es). Avec Murray Bookchin ou l'objectif communocĂšne, aux Ă©ditions de l'Atelier, le sociologue Ă  Paris Nanterre Pierre SauvĂȘtre la partage enfin Ă  un large public.

Le podcast. Ses pas de danse Ă©lectrisaient les foules lors des manifs Ă©cologistes ou contre la rĂ©forme des retraites. Mais pourquoi diable Mathilde Caillard, alias MC, s’est-elle mise Ă  « danser pour le climat » ? Si cela dĂ©bute par une histoire de famille, pour la jeune activiste, la fĂȘte – techno en particulier – est non seulement intrinsĂšquement politique, elle permet aussi d’ouvrir et d’amplifier la lutte. Ce dernier Ă©pisode du podcast « Le Sens de la fĂȘte » de Sonique Studio est un bijou d’énergie Ă  Ă©couter.

Miaouss. Attention, film Ă©vĂ©nement. Hier sortait en salles le long-mĂ©trage d’animation Flow, vĂ©ritable sensation du dernier festival d’Annecy oĂč les aventures d’un chat noir dans un monde post-effondrement sans humain – et sans dialogue ! – Ă  la rencontre de la solidaritĂ© animale a remportĂ© le Prix du jury, du public et de la meilleure musique originale. RĂ©alisĂ© en partie en France par le Letton Gints Zilbalodis, il serait, pour Guillermo Del Toro, « l'avenir du cinĂ©ma d'animation ». Pas mieux.

5. Petits liens

Vous avez un projet ou une annonce Ă  faire paraĂźtre sur Pioche! ? Écrivez-nous Ă  [email protected].

  • Le collectif d’artistes Le Bruit qui Court fera l’avant-premiĂšre de son film Wecop le 6/11 au cinĂ©ma Le Brady (Paris 10e), suivie d’une rencontre avec l'Ă©quipe autour du canular comme mode d'action politique.

  • Le lendemain Ă  Marseille, le Cofees, l’asso des festivals et Ă©vĂ©nements Ă©coresposables en rĂ©gion PACA, fĂȘtera ses 10 ans avec une journĂ©e prĂ©parĂ©e par les Ă©mĂ©rites Lucie Bouchet et David Irle. Programme et inscriptions ici.

  • Compositeur et sociologue Ă  l’UniversitĂ© de Dijon, François Ribac mĂȘle histoire de l’art, enquĂȘte sociologique et analyse esthĂ©tique pour mieux comprendre le dialogue entre Ă©cologie et « Arts de la scĂšne et musique dans l'AnthropocĂšne ». À lire et tĂ©lĂ©charger gratuitement.

  • Également ouvertes, les inscriptions aux prochaines Rencontres rĂ©gionales des Ă©vĂšnements responsables organisĂ©es le 21/11 par ÉlĂ©men’Terre au Kiwi Ă  Ramonville, prĂšs de Toulouse.

  • Les JEER, JournĂ©es de l’évĂ©nementiel Ă©co-responsables de la filiĂšre Ă©vĂ©nementielle, culturelle et sportive auront lieu Lyon Ă  les 28 et 29/11. Les inscriptions sont ouvertes.

  • Les Nuits des ForĂȘts ont ouvert leur appel Ă  participation 2025.

  • Plus que 16 jours pour aider Emma, cette jeune paysanne boulangĂšre en Haute-Loire, rare femme cheffe d'exploitation – et amie du musicien LĂ©mofil – qui a besoin d'aide pour renouveler ses Ă©quipements afin de produire dans de bonnes conditions et rĂ©pondre Ă  la demande. Campagne en cours ici.

  • Le rĂ©seau Arviva lance deux enquĂȘtes Ă  destination des pros du spectacles vivant pour saisir 1/ les besoins, freins et manques pour intĂ©grer la transition Ă©cologique Ă  leurs pratiques pros (Ă  remplir ici) et 2/ les besoins, freins et pratiques en matiĂšre de clauses Ă©cologiques contractuelles (Ă  remplir ici).

6/ Commuto

đŸ€“ Merci d’avoir parcouru jusqu’ici cette nouvelle Ă©dition de Pioche!. Qu’en pensez-vous ? Écrivez-nous (sans filtre) Ă  [email protected].

💌 On vous a transmis cette infolettre et vous voulez recevoir les prochaines ou lire les prĂ©cĂ©dentes ? C’est ici : bonne.piochemag.fr.

đŸ» Et retrouvez Pioche! sur Instagram, Threads, LinkedIn, Facebook et piochemag.fr.

đŸ‹ïžâ€â™€ïž Pour vous engager dĂšs aujourd’hui prĂšs de chez vous, piochez l’un des dĂ©fis citoyens et solidaires dans le rĂ©seau des actions bĂ©nĂ©voles de notre partenaire Diffuz