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🌿 Quiproquo | Nicolas Mathieu | Un air de famille | Partie de campagne | Biosphere | Plantes sauvages...
Culture & écologies 🌿
Bonjour Ă toutes et tous, et bienvenue si vous rejoignez Pioche!
Une culture populaire capable de « toucher les gens » sur les sujets d’écologie, ça ressemble à quoi ?
À une écologie qui fait de bonne place à « l’expérience des corps et aux vécus », et au langage de toutes et tous, nous glissait en interview un transfuge de classe nommé Nicolas Mathieu, lauréat du Goncourt 2018 avec Leurs enfants après eux.
Nous avions là une raison suffisante pour discuter avec lui de la gauche et des villes moyennes, et de ce que serait une écologie enfin débarrassée « de sa prétention à détenir la vérité ». Entre autres joyeusetés.
Bonne lecture,
Et Bonne Pioche!
En parlant d’histoires, dernière semaine pour participer à ce concours d’écriture autour des nouveaux imaginaires, organisé par l’éco-lieu Bonne Vie et dont Pioche! est partenaire. La nouvelle victorieuse remportera un séjour (du 14 au 20/04) dans cet ilot de paix au bord du Loing, à 1h de Paris, ainsi que sa publication sur piochemag.fr. Belle.
1. Quiproquo
Mathieu Asselin, « Van Buren, Indiana », 2013. À voir aux Abattoirs, Toulouse (cf. plus bas).
Shut up and drive. Greenpeace France était hier devant les tribunaux attaquée par TotalEnergies dans une « procédure-bâillon », qui vise à supprimer un rapport de l’ONG estimant les émissions de GES annoncées par Total 3X inférieures au réel. Une « inquiétante première pour l’Hexagone » et « une menace grave pour la liberté d’expression » signent de concert Claire Nouvian, Camille Etienne, Lucie Pinson, et bien d’autres dans Libé.
Moonwalk. Conséquence directe de la réduc’ d’1 Mds€ sur le budget MaPrimeRénov' décidée par Bercy, l'objectif de rénovations thermiques globales de logements cette année passe de 200000 à 150000 annonce M. Béchu, ministre de la Transition écologique. Par ailleurs, le tout nouveau fonds « Numérique et données pour la planification écologique » doté de 50M€ n’en comptera finalement que 20. Gros quiproquo sur la « décroissance ».
Clap Clap. Sorti en pleine crise agricole, le docu La Ferme des Betrands dépasse les 145000 entrées, à la surprise de son réalisateur Gilles Perret (relire notre interview). « Quand on fait un film comme ça, très personnel et très local, on ne sait pas trop si on va intéresser au-delà de notre vallée » dit-il aujourd’hui, expliquant ce succès par cette « belle histoire d’agriculteurs qui ont choisi leur métier, en sont fiers et vivent dignement de leur revenu ».
Pendant ce temps, se terminait hier en Arabie saoudite la SnowBlast KSA Cup, une compétition de ski freestyle en plein air, à 25°C, sur une neige 100% artificielle… et sans aucune athlète féminine. « Bien sûr que ce n’est pas idéal, mais les athlètes, non soutenus par la Fédé, ont aussi besoin de financer leur saison » explique à L’Équipe l’entraineur français de freeski Grégory Guenet.
2. « Un des problèmes de l’écologie, ce sont ces discours en surplomb » – Nicolas Mathieu
En août dernier, au festival Agir pour le vivant, on s’entretenait avec Nicolas Mathieu pour parler d’écologie. A priori pas le sujet qu’il maîtrise le mieux, de son propre aveu, et c’est précisément ce qui nous intéressait chez lui.
À l’heure où l’on dépeint encore trop souvent les zones péri-urbaines et rurales comme en « contre » de l’écologie, qu’en pense celui qui a si bien su dépeindre cette France périphérique ? Une rencontre au café, signée Samuel Chabré et Jean-Paul Deniaud.
Est-ce que tu peux définir ces territoires dont tu parles dans tes livres ?
Nicolas Mathieu : Le problème de cette France-là , c’est que ce qui ferait son homogénéité n'est pas si évident à comprendre.
On peut la définir en creux. Ce n’est pas les grandes métropoles, ce n’est pas non plus les quartiers de grands ensembles qui concentrent de grands problèmes sociaux. C’est une multiplicité de territoires entre les deux, qui vont de la cambrousse à des villes comme Nancy. Ce qui fait que j’en parle, c’est que c’est celle que je connais. C’est mon point de départ.
Mais si on doit les définir à la truelle, il me semble qu’ils sont animés par le sentiment de la sous-représentation et du déclin. Du « c’était mieux avant, quand même ».
Tu arrives à avoir une écriture sans surplomb, sans misérabilisme, sans complaisance, qui permet de créer un sentiment d’identification. Certain·es se disent en te lisant, « il écrit la France d’où je viens ».
C’est aussi ce que font des photographes américains comme William Eggleston ou Stephen Shore : montrer ce qu’il peut avoir de noble et de beau dans des espaces qui ne le sont pas a priori, type échangeurs autoroutiers, diner américain.
On peut le faire avec un Saint Maclou et un Buffalo Grill. Il suffit de le prendre par le bon bout, de regarder ce que les gens y vivent. Les personnages se retrouvent dans un Kyriad pour faire l’amour. J’essaye de montrer qu’il y a une poétique des ZAC (ndlr : zone d'activité commerciale).
Ensuite, où on se place pour parler de quelque chose ? On peut parler de tout, mais pas n’importe comment. Il faut se mettre au bon endroit. Et le bon endroit ce n’est pas le surplomb, ou la contre-plongée qui héroïse. Au cinéma, ça serait le trois-quarts arrière, la caméra qui suit par-dessus l’épaule et qui est empathique et près de la peau. Essayer de voir ce que les gens éprouvent.
Comment faire le lien entre Ă©cologie et cette France-lĂ ? Comment on en parle ?
C’est un des grands problèmes de l’écologie, ces discours qui viennent en surplomb, pour lesquels il faudrait que les gens soient à la hauteur. Ce n’est pas comme ça le fonctionnement démocratique. On tire sa légitimité de l’adhésion qu’on suscite chez les gens, et ce ne peut pas venir d’une prétention à détenir la vérité. Ça suppose de travailler les âmes et les corps. (…)
Après, je n’en sais rien comment il faut faire. Mais je pense tout de même que le désir est maître là -dedans. Qu’est-ce que les gens désirent ? Si l’objet de désir, c’est un SUV ou une ville du quart d’heure, ce n’est pas la même civilisation qui est produite ensuite.
Il faut descendre dans les corps et dans les esprits, pour définir des horizons désirables pour nous et nos enfants. C’est ce qui a été le génie de la société de consommation avec Hollywood, contre le communisme.
Dans ton travail, tu fais parler une France qu’on n’entend pas. Comment parlerait-elle de l’écologie ? Ne faut-il pas finalement d’abord l’écouter ?
Nicolas Mathieu : Écouter ça serait le plus bel antidote au dédain. Il ne faut pas parler pour mais parler comme. Peut-être qu’il faudrait un discours écolo qui parle comme le/la citoyen·ne lambda, qui ne monte pas en chaire pour sermonner. (…)
Lire la suite de notre entretien.
Se procurer le dernier livre de Nicolas Mathieu, Le Ciel ouvert (Actes Sud, février 2024).
3. Eastside
Un air de famille. Cette semaine, les pôles de l’écologie se trouvent à l’Est toute. Et ça démarre dès aujourd’hui à Lyon avec l’historique – et gigantesque – salon Primevère, 38e du nom (tout de même), qui regroupe tout ce que l’écologie et ses alternatives peut compter d’auteur·es, militant·es, collectifs, et autres porteur·ses de transformations concrètes. Un classique.
Binge. Un peu plus loin vers le levant démarre demain, et jusqu’au 14/04, le 19e Festival du Film Vert, organisé dans 90 villes de Suisse et de France (notamment en Haute-Savoie) : 400 projections pour une centaine de films, avec les Pourquoi on se bat, Gardiens de la Forêt, Naïs au Pays des Loups ou encore la Théorie du Boxeur, dont on s’est fait l’écho ici dernièrement.
C’est le bouquet. À l’Est aussi, mais de Paris cette fois, le Parc Floral accueille le 6/03 l’événement Talents for the Planet – LE salon dédiés aux métiers de la transition écologique et sociétale – à la programmation impressionnante. On y a repéré les ateliers et rencontres sur l’éco-anxiété, la joie militante et la solidarité énergétique parmi ce joyeux foisonnement.
À venir aussi, notre intervention à Lyon (décidément) le 7 mars prochain pour une table-ronde sobrement – mais efficacement – intitulée « Raconter les territoires ». Organisée dans les locaux de l’incubateur média Hôtel 71, on y parlera du rôle, et de la responsabilité, des médias dans leur appréhension des « territoires » donc, avec nos camarades journalistes de Chabe!, Pays, et Îlots Magazine.
4. Partie de campagne
Julien Beneyton, « The world is yours », 2023
L’expo. En 150 œuvres, Artistes et paysans. Battre la campagne., qui s’ouvre aujourd’hui aux Abattoirs de Toulouse, explore les riches liens entre modes esthétiques et mondes paysans, depuis le XIXe et les représentation de plein air, jusqu’au XXe et ses musées d’ethnologie et de traditions populaires, en passant par le travail d’Agnès Varda, les œuvres actuelles, et les agriculteur·ices-artistes. Must seen.
Le livre. Déjà 10 ans que l’éditeur Seuil a ouvert ses portes à Reporterre pour une série d’ouvrages, d’enquêtes notamment. Pour honorer cet anniversaire, Ils inventent un monde écologique, publié ce jour, propose 12 reportages « qui montrent qu’un autre monde est possible » : Sécu alimentaire à Montpellier, Bretons qui pêchent à la ligne pour préserver la mer, anarchistes normands repensant leur cohabitation avec les animaux… Et ça fait du bien.
Le film. Peut-on vivre 4 mois en autonomie en plein désert mexicain sans autres ressources en eau, alimentation et énergie que celles de cet aride environnement ? Tout à la fois expérimentation technique et préfiguration d’un futur effondré, cette « Biosphere » de l’ingénieur « low-tech » Corentin de Chatelperron et sa complice Caroline Pultz offre un formidable sujet pour ce film, qui prouve combien l’ingéniosité humaine n’est rien sans la collaboration.
5. Qu’en dira-t-on
Vous avez un projet ou une annonce à faire paraître sur Pioche! ? Écrivez-nous à [email protected].
Vous avez suivi nos conseils et vous êtes à Lyon ce week-end ? Restez-y ! Le 4/03, le réseau des arts à modes doux Armodo organise ses assises à La Friche Lamartine.
Le lendemain, filez à à l’ENSA de Dijon pour la journée d’études intitulée « Infiltrations sensibles » réunissant artistes, paysagistes, urbanistes, institutionnel·les et militant·es, autour d’une question : l’eau.
L’autrice Titiane Haton publie son livre Cuisiner les plantes sauvages aux éditions Ulmer, où retrouver 21 plantes à dénicher autour de soi. Aussi beau qu’utile, et gourmand.
6. See ya
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